Actualités

Marée haute dans la Grande Cariçaie

image d'introduction

La crue historique qui touche actuellement la région des Trois-Lacs, événement qui n’avait pas été observé depuis 1955, n’a bien sûr pas épargné la Grande Cariçaie. La montée des eaux, dont le niveau était, à son pic, à plus d’un mètre vingt au-dessus de son niveau habituel affecte tous les aspects de la gestion des réserves et du quotidien des collaborateurs et collaboratrices de l’Association de la Grande Cariçaie.

Les monitorings en cours sont différemment impactés par cette montée des eaux. Certains monitorings de la flore et de la végétation ont pu cependant s’exercer sur les surfaces hors d’eau, alors que d’autres ont été différés d’une à deux semaines. Du côté des suivis de la faune, la session de juillet du suivi triennal des libellules dans les réserves des Grèves de Cheseaux et celle de Cheyres a dû être effectuée en waders (bottes de pêcheur) ou même en canoë. Le suivi annuel de la population de la très rare Déesse précieuse (Nehalennia speciosa) a été interrompu, les habitats étant pratiquement inatteignables. La session de juillet du suivi des orthoptères précoces du marais a été supprimée, alors que le suivi papillons de ce mois n’est, lui, pas perturbé par cet épisode de crue.

Il est difficile, dès maintenant, de juger de l’effet de cette crue dont la durée n’est pas encore connue et qui reste un phénomène ponctuel. La plupart des espèces végétales présentes dans les réserves naturelles étant adaptées à ce type de phénomène, il est probable que la crue de 2021 représente pour elles plus un modulateur de leur distribution qu’une menace de disparition. Les espèces développant et produisant leurs graines durant l’été, comme la Gentiane des marais (Gentiana pneumonanthe L.), devraient voir leur distribution réduite alors que d’autres, plus aquatiques et profitant de l’eau comme vecteur de dissémination, pourraient profiter de cette crue pour conquérir de nouveaux territoires. Cette crue pourrait aussi freiner l’apparition et l’extension des ligneux colonisateurs des marais. Elle favoriserait ainsi la conservation de ces surfaces, les plus riches en espèces rares et menacées, et pourrait alléger, pour les quelques prochaines années, les travaux de débroussaillage planifiés annuellement par les gestionnaires.

Les premières observations de l’effet de cette crue montrent une diminution drastique du nombre de la plupart des espèces de libellules et de tous les orthoptères observés dans les zones envahies pas le lac, sans transfert vers des zones exondées. La faune du sol, comme les mollusques ou coléoptères qui, dans un premier temps, avait pu trouver refuge dans les dernières parties exondées des tiges de roseaux, a finalement été noyée lors du pic de crue. Une hécatombe de vers de terre a notamment été constatée dans les forêts inondées. À long terme, une sélection des espèces spécialistes adaptées à ce type de phénomène pourrait avoir lieu, alors que les espèces plus banales mettront quelques temps à recoloniser ces surfaces inondées.

Les oiseaux en pleine couvaison ou dont les jeunes pouvaient encore être au nid à cette période, par exemple le Héron pourpré, ont été grandement perturbés par cette crue en raison de l’inondation de leurs nids. En revanche, les familles de canards et autres oiseaux d’eau dont les jeunes étaient déjà volants avant la montée des eaux ont certainement été moins impactés. Les derniers recensements montrent que les effectifs d’oiseaux dans la Grande Cariçaie ont subi une forte diminution, beaucoup s’étant probablement déplacés temporairement vers d’autres sites. Heureusement, la reproduction des oiseaux ne sera pas totalement réduite à néant, les passereaux de la Grande Cariçaie ayant pour la plupart déjà terminé leur première nichée.

Nombre d’infrastructures, notamment des passerelles, ont été endommagées. Lorsque le lac aura retrouvé un niveau plus habituel, un effort important de réparation devra être entrepris par l’Association et les communes riveraines. Actuellement, les sentiers et passerelles les plus proches du lac sont pour la plupart impraticables et le resteront en partie jusqu’à leur remise en état. Des travaux forestiers seront nécessaires pour évacuer les arbres couchés en travers des chemins et sécuriser certains arbres fragilisés par cette immersion soudaine.

Dans certaines réserves, la montée des eaux et la bise qui a suivi ont amené des grandes quantités de déchets et de troncs flottants à l’intérieur du marais. Un nettoyage des déchets doit donc être entrepris pendant que l’eau est encore haute et que ces matériaux sont bien visibles. Les troncs peuvent représenter un risque de casse pour les machines qui fauchent les marais et l’équipe de l’Association s’attèle actuellement à les repérer. Ils devront être évacués avant la saison de fauche qui doit normalement débuter mi-août, si les conditions le permettent.

Actualités

Ce site utilise des cookies afin de vous offrir une expérience optimale de navigation. En continuant de visiter ce site, vous acceptez l’utilisation de ces cookies.

J’ai comprisEn savoir plus